Triste réalité...

Bonjour à tous !

    Je profite de cette fin d’après-midi orageuse pour vous faire partager notre quotidien malgache. Il tonne si fort que les murs de la maison tremblent ! Il y a un vent à décorner les zébus et la pluie tombe en trombes. (Petit message subliminal pour ceux qui s’obstinent à nous dire « Ohlala, vous allez revenir noires ! » Noires de crasse oui.^^)

    Hier soir, Alex nous a emmené dans un bar de nuit ! Yahouuu J  1^ère sortie nocturne pour nous.

    Tana la nuit c’est heu… comment dire… glauque. Les rares lampadaires publics ne fonctionnent pas, les voitures roulent sans feu, les nécessiteux sales, drogués ou saouls errent dans les rues, les enfants dorment sur les trottoirs. Ambiance particulièrement dérangeante.

    On a enfin goûté à la bière malgache (THB, Three Horses Beer). Une bonne bière blonde savoureuse. Nous étions dans un bar dans le quartier « chic » de Tana. Trop risqué de traîner de nuit dans les petites ruelles. On a encore lu dans le journal qu’un homme s’est fait agresser violemment et laissé pour mort pour 500 ariary (je vous rappelle qu’1 € = 3 000 ariary …)

[Pour ceux qui stressent pour cet homme, il va mieux et n’a pas succombé à ses blessures apparemment !] 

Bref, c’est un peu la jungle ici !

     Nous étions donc dans le bar, à écouter un concert de musique malgache actuelle très rythmée. Et malheureusement, nous avons assisté à un spectacle tout autre : les dizaines de prostituées qui se trémoussaient dans des tenues très minimalistes. Les plus jeunes devaient avoir aux environs de 14 ans… Sous nos yeux, elles partaient à tour de rôle avec des hommes vieux et riches… et… blancs bien souvent. Choquant. Aux toilettes, nous avons pu discuter avec certaines d’entre elles qui disent travailler pour elles et qu’elles n’ont pas d’autres alternatives pour vivre. Une bien triste réalité. La prostitution est un fléau à Madagascar. Non seulement autorisée, elle est très très visible. Spectacle désolant qui nous a vite passé l’envie de danser !

    Nous avons la chance d’être avec Alex qui n’a presque pas de tabou et nous décrit sa société telle qu’elle est sans essayer d’en changer la couleur. Il nous a donc parlé très ouvertement des abus sexuels sur les mineurs qui sont monnaie courante ici. Nous écoutions, bouche bée. A Madagascar, les parents acceptent de vendre leurs gamines vierges à des pasteurs, voisins, oncles… Pour une maigre poignée d’argent. Cette pratique est très répendue.

    Les viols sur mineurs courent aussi les rues. Ensuite, on protège l’adulte en accusant la gamine de l’avoir aguiché. Celle-ci devient alors le bouc émissaire du quartier ou du village. Accusée d’être une briseuse de ménage, elle peut se faire tabasser par certaines femmes médisantes qui « craignent » pour leur ménage. Mesurez l’horreur de la situation ! Ecoeurées que nous sommes.

    Bon nombre de gamines arrivent tant bien que mal à l’hôpital avec des infections graves à leur appareil génital déchiré. C’est ce que nous a expliqué une bénévole française qui agit dans les hôpitaux auprès des enfants. En effet, à Madagascar, l’hôpital ne fournit pas de drap ni de repas. Juste un lit et un matelas. C’est à un membre de la famille de veiller le malade. Les frais d’hospitalisation sont faramineux et souvent, les familles, démunies face à ces dépenses sanitaires, préfèrent abandonner le membre de leur famille en le laissant seul à l’hôpital. (Beaucoup d’enfants et de personnes âgées restent sur le carreau dans de piteux états…)

    Plus le temps passe, plus les choses nous révoltent. Le droit des enfants n’est pas que bafoué. Il est tout simplement inexistant. Comment ce pays peut-il prétendre un jour sortir de la misère s’il ne protège pas et n’éduque pas les adultes de demain ?

    Autre exemple révoltant et inhumain : à Madagascar, les enfants peuvent aller en prison dès l’âge de 5 ANS. Non, je n’ai pas fait de faute de frappe. Dès cinq ans, pour un simple vol à l’étalage, les enfants sont placés en rétention dans des centres surpeuplés. Alex est en train d’arranger une visite pour nous dans un de ces centres pour petites filles. Nous craignons un peu la réalité que nous allons découvrir…

    Pour les adultes, c’est tout aussi drastique. Souvent les peines sont démesurées et gens meurent en prison… à moins d’avoir de l’argent bien sûr ! Madagascar est le pays rêvé pour celui qui a de l’argent et qui aime vivre au dessus des lois…

    Malheureusement, les chiffres sur la pauvreté prouvent à quel point il est compliqué de vivre ici : 78% des malgaches vivent avec moins de 30€ par mois. (Chiffres parus au journal de samedi 9 février). Chiffres officiels. Mais quel est le chiffre officieux ?...  

    Pas étonnant qu’on a failli se faire « pick-pocketter » à deux reprises notre sac à dos, pourtant porté sur le ventre, par des gangs armés de couteaux, devenus professionnels dans cette activité lucrative.

...

    Je viens de relire cet article. Excusez-moi, il est très noir et peut faire peur ! Ce n’est pas le but visé, mais plutôt un petit coup de gueule dans le vent devant tant d’injustices et de mépris des Hommes. C’est révoltant. J’avoue que cette  pauvreté omniprésente remet un peu en cause notre système de valeurs.

    Mais ne vous inquiétez pas, on est heureuse ici et tout se passe toujours aussi bien ! Nous savourons notre dernière semaine au sein du centre Ankanifitahiana, nous profitons de la joie des enfants, de l’amour de la famille dans laquelle nous sommes et le riz nous réussi toujours aussi bien !

Vue de Tana prise du point culminant de la ville : le palais de la Reine.

Comments

[zabou35]

Solenn, je viens de te lire, je suis profondément triste, outrée, choquée, qu'aujourd'hui encore on puisse toucher à des enfants, des innocents, quand les Hommes cesseront-ils de se comporter comme des monstres face à ces proies si faciles pour eux et si fragiles. C'est vrai que nous sommes des privilègiés par rapport à ces êtres sans défense, qu'elle chance nous avons, nous en rendons-nous compte, il est si facile pour l'Homme d'ignorer, de ne pas vouloir voir ce qui est dérangeant.Prends soin de toi, bisous.

[Francis]

Comme toujours, Solenn, tu sais nous faire partager ce que tu vis, ce que tu ressens, ce que tu découvres même si ce n'est pas très reluisant, c'est le moins qu'on puisse dire. Certes, on lit ces horreurs dans des magazines ou des journaux, mais ce n'est pas la même chose quand elles sont racontées par quelqu'un qu'on aime. Ce que tu nous décris est malheureusement le lot de tous ces pays où la misère est le quotidien des pauvres gens.

[Flo Diabolo]

Triste de voir que le cours de nos vies dépende autant de l'endroit où l'on nait !!

Ces enfants méritent de VIVRE et non de SURVIVRE.



« Je puis tout pardonner aux hommes, excepté l'injustice, l'ingratitude et l'inhumanité. » [Denis DIDEROT]

[joel]

ce qui m'écoeure le plus c'est le silence , la politique de l'autruche , l'inaction ...de tous ceux qui savent ,qui détiennent le pouvoir et qui ne font RIEN !!!!!

On ne peut que constater la bestialité de l'HOMME sa décadence et sa répugnance face à des enfants sans défense.

Horrible !

j'ai honte d'appartenir au genre humain.....

[mau]

Je n 'ai pas de mot pour exprimer ce que je ressens à la lecture de ce texte ................. aussi je m'abstiens .................. en laissant la place à d'autres qui sauront peut être écrire notre ressenti vu d'ici , avec ce mode de vie si luxueux et confortable , et aussi ce sentiment de sécurité que l'on trouve tout à fait normal !